
En plus d’offrir des parfums merveilleux et une vue à couper le souffle, un pré ou une prairie de fleurs sauvages permet aussi d’attirer des animaux sauvages. Il ne s’agit pas d’un jardin conventionnel ou impeccablement soigné, mais d’une approche plus fantaisiste et vivante de l’aménagement paysager, tout aussi belle. Ce paysage dynamique a beaucoup à offrir. Vous serez accueilli(e) par une palette spectaculaire de couleurs. Vous créerez un habitat qui contribue à offrir du nectar, de la nourriture et un abri à des oiseaux, à des insectes, à des reptiles, à des amphibiens et à un grand nombre de petits mammifères que vous aurez le plaisir d'apercevoir ou d'observer.
En reliant un écosystème à un autre, vous permettrez à des animaux sauvages de se sentir suffisamment en sécurité pour utiliser l’ensemble d’un espace naturel varié; un pré ou une prairie dans un secteur qui n’était précédemment que de l’herbe entre deux peuplements d’arbustes crée un espace de transition invitant pour la faune. Si l’érosion du sol vous préoccupe, un pré disposé de manière stratégique peut y remédier. Votre pré pourrait remplir un petit coin ouvert et ensoleillé de votre jardin ou s’étendre sur plusieurs hectares. Sur le long terme, vous aurez créé, à même votre propriété, un écosystème à part entière qui nécessite peu d’entretien et qui ne nécessite aucun arrosage ni aucun engrais. Il s’agit d’une rareté convoitée en matière d’aménagement moderne. Avec un peu de chance, vous lancerez peut-être une nouvelle tendance dans le voisinage.
Une prairie ou un pré?
Les prés comme les prairies sont composés d’un mélange de fleurs des champs et de graminées cespiteuses (qui poussent en touffes), ainsi que de quelques arbres épars. Les écologistes définissent les prés et les prairies par la façon dont ils subsistent. Une prairie demeure à l’état de prairie en raison d’incendies d’origine naturelle, tandis qu’un pré est le résultat d’une sécheresse, d’une inondation ou de terres agricoles retournées à un état naturel. Bien que les prairies et les prés comptent de nombreuses espèces de fleurs sauvages en commun, une distinction peut être faite entre ces communautés végétales en fonction de la présence ou de l’absence de quelques espèces clés. Ces espèces, bien sûr, varient selon votre emplacement. Les jardiniers distinguent principalement les prés et les prairies selon leur contenu herbeux. On pense à un pré comme à une zone dominée par des fleurs colorées agrémentées de quelques graminées, et à une prairie comme possédant une plus grande proportion de graminées et moins de fleurs apparentes.
Lorsque vous établissez un jardin de pré ou de prairie sur votre terrain ou votre terre, essayez d’imiter les milieux naturels de votre région pour attirer la faune locale. Si vous ne trouvez pas de zones naturelles dont vous inspirer à proximité, pensez à ce qui s’y trouvait historiquement. Consultez des dossiers relatifs à l’histoire naturelle par l’intermédiaire de votre municipalité ou communiquez avec le département des sciences naturelles d’un collège ou d’une université de votre région. La similitude avec les communautés végétales indigènes qui prospèrent naturellement dans votre région est l’une des clés de la réussite à long terme d’un jardin aménagé sous forme de pré ou de prairie de fleurs sauvages. L’utilisation de plantes et de graminées vivaces indigènes adaptées à votre région garantit que vos plantations auront besoin de très peu de soins une fois établies – et en plus, la faune locale vous en sera reconnaissante. Investissez du temps dans la recherche et le choix de vos plantes, pour vous assurer qu’elles correspondent à la nature de votre sol et aux conditions d’humidité et d’ensoleillement; ça en vaut la peine!
Photo : Freya Rasmussen
Comment démarrer
Choisissez un secteur de votre propriété qui peut servir de zone de transition entre des secteurs sauvages et conventionnels ou remplacez simplement une partie de votre pelouse. Il doit s’agir d’un endroit ensoleillé; le mieux est un espace découvert ou un site doté d’une bonne circulation d’air. Tenez compte de ce qui était planté dans ce secteur avant. S’il était autrefois envahi de mauvaises herbes, vous voudrez peut-être reconsidérer cet emplacement ou vous montrer prêt(e) à faire des efforts supplémentaires pour éliminer les mauvaises herbes. Les sites secs sont généralement moins envahis par les mauvaises herbes.
Si tout ce dont vous disposez est un petit coin ensoleillé dans votre cour ou votre jardin, n’hésitez tout de même pas à l’idée d’un pré ou d’une prairie. Il vous suffit de réduire sa taille. La plantation de ne serait-ce que quelques bouquets de fleurs des champs et de graminées des prairies profite à la faune. Essayez d’intercaler vos plantes avec une ou deux vivaces par pied carré. Si vous en plantez plusieurs par pied carré, votre jardin paraîtra moins clairsemé au commencement, mais vous devrez peut-être éclaircir vos plantations par la suite. Amusez-vous avec votre espace limité; disposez vos plantes là où bon vous semble. Bien que votre espace puisse être limité, vous n’avez pas à vous restreindre dans la diversité de vos plantations. Utilisez autant d’espèces de plantes que vous le pouvez, pour maximiser le nombre d’espèces d’animaux qui visitent votre jardin.
Pour un jardin de pré ou de prairie plus petit, vous pouvez choisir d’acheter des plantes vivaces ou d’utiliser des plantes en mottes démarrées à partir de semences. Votre pré s’établira plus rapidement de cette façon. Pour une surface plus étendue, un ensemencement direct est probablement une meilleure option. L’idéal est d'obtenir des semences auprès d’un fournisseur de plantes indigènes – préférablement local – digne de confiance, afin de mieux répondre aux besoins de votre région. Un fournisseur fiable vous dira comment les semences ont été recueillies et d’où elles proviennent. Il est souvent préférable d’acheter auprès d’un fournisseur plutôt que de recueillir vos propres semences, pour éviter la réduction de populations sauvages ou la cueillette de semences de fleurs en voie de disparition ou menacées, qui peuvent être protégées en vertu de la Loi sur les espèces en péril. Évitez les mélanges typiques de fleurs des champs vendus dans les magasins de jardinage, simplement parce qu’ils contiennent principalement des annuelles. Vous obtiendrez alors un beau champ de couleurs pour la première ou la deuxième année, mais les mauvaises herbes reprendront rapidement le dessus. Pour ne pas travailler au hasard, faites des recherches en ligne pour trouver des idées ou des mélanges de semences pré-assemblées qui correspondent aux conditions de votre sol, ainsi qu'aux conditions d'humidité et d'ensoleillement.
En règle générale, la densité de plantes dans un pré est d’une plante par pied carré ou moins. À cette densité, les plantes fournissent leur propre ombre, repoussent les mauvaises herbes et conservent l’eau, ce qui signifie qu'aucun paillage, ni aucune fertilisation, ni aucun arrosage ne sont nécessaires une fois votre pré établi. Pour obtenir un pré agréable, plantez 60 % de semences de fleurs des champs pour 40 % de semences de graminées. Appliquez environ 11 kilogrammes de ce mélange par hectare. Une merveilleuse astuce proposée par Paul Jenkins et Miriam Goldberger de Wildflower Farm consiste à inclure quelques ivraies annuelles dans votre mélange de semences, pour réduire la concurrence des mauvaises herbes pendant la première saison de croissance et contribuer à donner un coup de pouce aux fleurs des champs. Les ivraies disparaîtront après la première saison, après que la nécessité de supprimer les mauvaises herbes se sera dissipée. Combinez le mélange de semences avec du sable ou de la vermiculite pour obtenir une distribution encore plus uniforme et éviter de planter trop de semences. Si vous ensemencez un secteur étendu, il vous faudra une planteuse à alimentation semi-automatique; vous pouvez sinon semer à la main, comme lorsque vous ensemencez une pelouse.
UN PLAN SUR QUATRE ANS (adapté des méthodes de Jenkins et de Goldberger)
J’imagine que, pour beaucoup, la moitié de l'attrait d’un pré de fleurs sauvages réside dans la supposition qu’il n'exigera pas de soins ou d’entretien. Ne vous méprenez pas. Toutes les choses qui en valent la peine exigent quelques efforts. Un beau pré luxuriant destiné à durer requiert un investissement initial de trois à quatre années; mais peu de temps après, vous obtiendrez un champ de toute beauté qui se renouvellera en ne nécessitant que très peu de soins. La patience est de mise. Il peut s’écouler deux années avant que certaines espèces de fleurs des champs ne fleurissent. Les bisannuelles et les vivaces sont plus longues à s’établir que les annuelles, mais elles durent plus longtemps. Pour obtenir un pré de longue durée, utilisez seulement des vivaces.
La suppression des mauvaises herbes constitue généralement la première tâche de mise en place de votre pré de fleurs sauvages; c'est une étape essentielle pour l’établissement des fleurs sauvages. Le temps supplémentaire consacré à l’enlèvement des mauvaises herbes permettra de réduire votre future charge de travail. Il y a deux options de démarrage. La première méthode, qui implique quelques étapes supplémentaires, consiste à utiliser de l’engrais vert, tandis que la deuxième méthode est plus intensive. Quelle que soit l’option de démarrage que vous choisissez, suivez les instructions ci-dessous pendant les quatre premières années.
DÉMARRAGE : OPTION 1
• Labourez la zone en question sur une profondeur de 15 à 20 centimètres, au printemps ou en automne.
• Si vous choisissez de commencer le projet en automne, plantez beaucoup de graines de sarrasin après le labourage. À l'aide d'un râteau, enfouissez le sarrasin dans la terre avant que les graines soient formées – c’est-à-dire avant que les pousses fraîches et tendres ne dépassent 15 centimètres – soit deux à quatre semaines après la plantation. Réensemencez immédiatement un autre lot de sarrasin, et incorporez-le également dans la terre avant que les graines ne soient formées. Laissez ensuite la zone reposer pour l’hiver. (Cette technique, connue sous le nom d’engrais vert, apporte au sol des éléments nutritifs qui permettent aux fleurs des champs d'avoir des tiges plus épaisses que dans la nature.)
• Après le dégel du printemps, couvrez la zone labourée avec une lourde bâche en plastique noir pendant deux ou trois semaines, afin que les graines de mauvaises herbes germent et meurent. (Il est important de supprimer toutes les mauvaises herbes de la zone à planter, pour faciliter la croissance de vos fleurs des champs.)
DÉMARRAGE : OPTION 2
• Ignorez la technique de l’engrais vert si vous le souhaitez. Si vous choisissez cette option, labourez le sol en automne (sur une profondeur de 15 à 20 centimètres).
• L'élimination des mauvaises herbes peut se poursuivre en continu tout au long du printemps, si nécessaire. Supprimez physiquement les mauvaises herbes avec une houe; répétez ce processus pendant des semaines, si vous en avez la patience.
• Couvrez la zone avec une lourde bâche en plastique noir pendant deux ou trois semaines, afin que les graines de mauvaises herbes germent et meurent.
PREMIÈRE ANNÉE
• Ensemencez la zone ou plantez des plantes en mottes.
• Ratissez la zone légèrement pour que les graines ne soient pas enterrées trop profondément. Les graines devraient se trouver à une profondeur maximale de six millimètres.
• Utilisez un rouleau pour que les graines soient bien en contact avec la terre.
• Paillez la zone plantée très légèrement – la paille est un bon choix de paillis. Puis tassez-la.
• N’ajoutez pas d’engrais, sous peine de créer une abondance de feuillage au détriment des fleurs, et d'encourager aussi la croissance des mauvaises herbes.
• Lorsque les plantes sortent de terre, arrosez la zone régulièrement (au moins une fois par semaine, sauf si la pluie est abondante), jusqu’à ce qu'elles soient bien établies. La plupart des fleurs des champs sont résistantes à la sécheresse une fois établies, mais jusque-là, le sol doit être maintenu humide mais pas trempé.
DEUXIÈME ANNÉE
• Vous devrez faucher votre pré au moins deux fois pendant l’été, à une hauteur d’environ 15 centimètres. Vous contribuerez ainsi à maintenir l’ivraie et les mauvaises herbes sous contrôle, sans endommager ou éliminer vos fleurs des champs.
• Si le pré paraît clairsemé, vous pouvez ajouter davantage de plantes.
• Supprimez les mauvaises herbes problématiques à la main, de façon sélective.
TROISIÈME ANNÉE
• L’ivraie aura alors disparu, mais vous devrez toujours faucher pour éloigner les mauvaises herbes. Cette fois, fauchez à une hauteur de 30 centimètres. Le fauchage favorise également le développement robuste et profond du système racinaire de vos fleurs des champs; ce tapis complexe de racines souterraines les aidera à mieux supplanter les mauvaises herbes.
• Supprimez les mauvaises herbes problématiques à la main, de façon sélective.
QUATRIÈME ANNÉE
• À ce jour, vous devriez être en possession d’un pré louangé! Vos plantes devraient être assez établies pour vous permettre de garder l’entretien à un minimum.
• Vous remarquerez moins de mauvaises herbes dorénavant. Les racines profondes et denses des plantes contribuent à empêcher leur croissance.
• Au fil du temps, vous constaterez que la croissance de votre pré est dynamique. Il y aura des différences chaque saison, et des espèces qui domineront à tour de rôle. N’hésitez pas à éliminer certaines de ces plantes pour faire place à d'autres selon vos envies, mais souvenez-vous que la plupart des animaux sauvages aiment les sites qui ne sont pas régulièrement perturbés.
Entretien
Vous devrez faire un peu d’entretien chaque année. Éliminez toutes les espèces indésirables et agressives, ainsi que les mauvaises herbes. Si des plantes agressives comme la gerbe d’or commencent à prendre le dessus, vous pourriez couper les têtes des fleurs avant qu’elles ne montent en graine.
Une fois votre parcelle établie, vous devrez faucher une partie différente de la zone au printemps, pour éviter que votre champ ou votre pré ne se transforme en boisé. Vous ne faucherez qu’une partie du champ, pour que les premiers insectes et les autres animaux qui utilisent vos plantations puissent se réfugier dans l’autre partie. Les chrysalides et les œufs d’insectes hivernants seront aussi préservés dans les parcelles qui ne sont pas dérangées. En outre, les sections fauchées au cours d’une saison donnée comporteront une végétation différente de celle des parcelles qui ne l’ont pas été. Il en découle une variance intéressante de textures et de couleurs qui ajoute un attrait visuel et une diversité faunique. Certains jardiniers fauchent aussi leur pré à la fin de l’automne et laissent les restes sur place pour stimuler le réensemencement.
Le fauchage de printemps doit débuter au cours de la troisième année et être répété chaque année par la suite. Il n’est pas nécessaire de faucher la totalité du pré tout de suite; il suffit d’en faucher une partie à la fois. Chaque année, alternez la parcelle que vous fauchez. Le choix du moment est très important – habituellement, un fauchage de mi-printemps est idéal, à moins que vous ayez planté un pré très sec avec des fleurs à floraison précoce. Si tel est le cas, alors un fauchage au tout début du printemps est recommandé. Le choix du moment est essentiel pour éviter d’endommager les fleurs des champs. Ne fauchez jamais de nouvelles pousses si elles sont supérieures à un demi-mètre de hauteur; sinon, les plantes nouvellement sorties souffriront. Il est essentiel de ratisser les débris excédentaires après le fauchage; la surface du sol doit être nue afin que le soleil puisse le réchauffer et qu’une germination appropriée puisse avoir lieu. Avant le fauchage, vérifiez s’il y a des oiseaux qui nichent à terre et repoussez-les gentiment si vous le pouvez. Si vous les repoussez entre le début et le milieu du printemps, leur reproduction n’en sera pas affectée, et ils auront le temps de reconstruire un nid.
Vous remarquerez peut-être, après un certain temps, que même le fauchage n’empêche pas la végétation ligneuse de s’installer. Vous devrez éliminer la plupart des plantes ligneuses de manière sélective (vous pouvez en laisser quelques-unes si vous le souhaitez). Coupez les arbres aussi près du sol que vous le pouvez et appliquez un herbicide aux souches. Essayez le vinaigre ordinaire, qui est plus doux que la plupart des produits commerciaux. La solution d’acide acétique type à 5 % devrait être suffisante pour la plupart des petites plantes ligneuses. Si vous n’obtenez pas de résultats, utilisez une solution légèrement plus forte ou faites bouillir le vinaigre pour augmenter son efficacité.
Ceux qui ont une grande expérience des prairies et des prés de fleurs sauvages peuvent choisir de recourir à la technique du brûlis contrôlé pour entretenir la zone. Si vous décidez d’adopter cette méthode, renseignez-vous sur la gestion des petits feux de prairie ou de pré, et demandez l’aide d’un spécialiste pour vous guider. Communiquez avec votre ministère des Ressources naturelles pour obtenir de plus amples instructions et avec votre service d’incendie local pour vous renseigner sur les règlements et les demandes de permission; il se peut que vous ayez besoin d’un permis. Le moment venu, rassemblez plusieurs amis, membres de la famille et voisins pour vous aider à entourer et à contrôler le feu, au cas où ce serait trop difficile pour une ou deux personnes.