Par April Overall et Kimberley Davies

Avez-vous déjà entendu une baleine à bosse chanter? C'est une expérience magnifique et émouvante. Les baleines à bosse ont une variété de chants à leur actif et modifient leur répertoire chaque année. En fait, toutes les espèces de baleines font entendre leurs voix sous l'eau. Elles crient à des fins de communication et de navigation et, pour certaines, pour trouver de la nourriture. Certaines espèces, comme la baleine bleue, émettent des sons très simples à très basse fréquence qu'elles utilisent pour communiquer sur de grandes distances, parfois des centaines de kilomètres. C'est fascinant.
Cet été, la Fédération canadienne de la faune a commencé à suivre le projet Whales, Habitat and Listening Experiment (WHaLE) qui utilise les sons que ces majestueuses baleines émettent dans l'objectif de contribuer à la conservation de ces mammifères en péril. En effet, nous avons encore beaucoup à apprendre au sujet de nos baleines, comme exactement où elles passent leur temps pendant qu'elles se trouvent dans les eaux canadiennes. Il est essentiel que nous résolvions ce mystère, car c'est alors seulement que le gouvernement sera en mesure d'établir des zones protégées autour des habitats de baleines sensibles.
Bien que certains habitats de baleines d'importance du littoral atlantique du Canada aient obtenu le statut d'aires marines protégées, ils représentent moins d'un pour cent du plateau continental des eaux canadiennes atlantiques. Comment protéger les baleines des menaces sur la majeure partie du plateau continental? Le gouvernement du Canada intervient en s'engageant à protéger 10 % des océans du Canada en tant qu'aires marines protégées d'ici 2020.
À l'aide de planeurs sous-marins (drones sous-marins autonomes), les chercheurs du projet WHaLE sont en mesure de détecter, d'écouter et d'enregistrer les sons des baleines, de sorte qu'ils peuvent localiser ces espèces dans l'océan Atlantique. Les données recueillies par l'intermédiaire de ces relevés seront cruciales pour l'établissement de zones protégées qui nous permettront de conserver davantage de baleines.
Tant que nous n'agirons pas, des menaces comme les collisions avec des navires, les enchevêtrements dans des engins de pêche, les changements climatiques et la pollution sonore perdureront pour nos majestueuses baleines.
Collisions avec des navires
Les collisions avec des navires constituent la principale cause de mortalité connue des grandes baleines, et toutes les grandes espèces de baleines ont été signalées en être victimes. Des secteurs industriels nombreux et variés exploitent de grands navires qui constituent un risque pour les baleines, notamment l'industrie des transports maritimes (saviez-vous que 90 % de tous les produits que nous consommons sont transportés par bateau?), l'industrie pétrolière et gazière (transport par citerne), l'industrie militaire, les navires de croisière, les gardes-côtes et les navires de plaisance.
Le risque de collision avec des navires augmente lorsque les lieux d'agrégation des baleines intersectent les voies de navigation et les collisions mortelles augmentent avec la vitesse des navires. Certaines études ont révélé que les baleines à fanons n'évitent pas les navires approchants et pourraient même avoir des réactions comportementales augmentant le risque, comme remonter à la surface. Heureusement, certains habitats de baleines sensibles se sont vus associer des limitations de vitesse et des mesures de déroutement en vue de réduire les risques.
Enchevêtrement dans des engins de pêche
Les enchevêtrements dans des engins de pêche représentent une source importante de mortalité chez les baleines, et une baleine enchevêtrée peut souffrir si elle traîne des engins de pêche derrière elle pendant des périodes prolongées. Bien que certaines baleines soient capables de se dégager, d'autres malheureusement meurent du fait des enchevêtrements.
Les enchevêtrements peuvent se produire avec plusieurs types d'engins de pêche, notamment les palangres, les filets dérivants, les pièges, les casiers ou les filets maillants. Les baleines noires de l'Atlantique Nord en voie de disparition sont particulièrement vulnérables aux enchevêtrements – de fait, 75 % d'entre elles comportent des cicatrices corporelles témoignant de tels incidents. Il n'existe à ce jour aucune réglementation de la pêche pour protéger ces animaux des enchevêtrements au Canada, bien que les pêcheurs fassent de leur mieux pour prendre des mesures permettant de réduire les risques.
Pollution sonore
Le Canada abrite les espèces de baleines les plus majestueuses au monde – des baleines à bosse aux baleines bleues. Malheureusement, beaucoup de ces magnifiques animaux sont menacés ou en voie de disparition. Nous devons faire notre part pour les sauver. Et pour y parvenir, nous devons pousser un peu la recherche afin de découvrir exactement où ces baleines passent leur temps tandis qu'elles se trouvent dans les eaux canadiennes. Alors seulement, le gouvernement sera en mesure d'établir des zones protégées autour des habitats des baleines sensibles.
Les baleines ont recours à la communication acoustique pour se localiser les unes les autres dans le vaste océan, tandis que certaines utilisent aussi cette technique pour naviguer et trouver de la nourriture. Or, pour communiquer et localiser leurs proies, il leur faut un espace de communication acoustique tranquille. Malheureusement, de nombreuses industries marines sont très bruyantes dans les bandes de fréquences utilisées par les baleines. Par exemple, l'exploration pétrolière et gazière sismique à recours à de grandes quantités d'énergie acoustique à haute fréquence pour localiser des réserves pétrolières souterraines, les militaires utilisent le sonar pour localiser les navires et les sous-marins, et les moteurs des grands navires produisent des sons bruyants à basse fréquence. Ces sons sont susceptibles d'endommager l'ouïe des baleines, de restreindre leur espace de communication, et de perturber leurs comportements naturels.
Changements climatiques
Les grandes baleines migrent entre leurs aires de mise bas, dans les régions tropicales et subtropicales, et leurs aires d'alimentation dans les régions tempérées et subarctiques, où une part importante de la biomasse de ce qu'elles consomment, à savoir zooplancton et petits poissons, se trouve en abondance. Les chercheurs savent que les modèles de distribution et de migration de nos baleines dépendent de la localisation de leurs proies. À mesure que nos climats se réchauffent et que nos calottes polaires fondent, les modèles de circulation océanique devraient se modifier. Nous craignons qu'il en résulte une modification de l'emplacement des proies dont les baleines dépendent si fortement et que, par conséquent, les changements climatiques aient des répercussions sur ces dernières.
Suivez le projet WHALE pour en apprendre davantage sur les grandes baleines du Canada et découvrir leurs habitats clés en temps quasi réel.